Hier, en regardant mes nouvelles, je suis tombé sur cette série de deux articles dans La Presse concernant le fournisseur Eden Telemed :
Une clinique virtuelle aux nombreux manquements : https://www.lapresse.ca/actualites/sante/eden-telemed/une-clinique-virtuelle-aux-nombreux-manquements/2025-01-14/eden-telemed/des-inquietudes-face-a-la-prise-en-charge.php#
Les problèmes soulevés ratissent large : prise en charge rapide et inadéquate pour de la télémédecine, pratique douteuse face à la prescription de médication, facturation à la RAMQ d'actes fait au privé, etc.
Nécessairement, ce genre de situation me fait me replonger dans mes propres expériences de travail. J'ai eu l'opportunité dans ma carrière, un peu avant de faire le saut à titre de travailleur autonome, d'oeuvrer pour un programme d'aide aux employés intégré à une plateforme de télémédecine 100% en ligne. À l'inverse de ce qui est reproché à Eden Telemed, cet employeur avait un cadre d'intervention très strict et rigide sur ce qui pouvait ou non être vue sur la plateforme.
Bien qu'à cette époque, je trouvais frustrant d'avoir à référer vers des services externes (plus souvent qu'autrement), je comprends aujourd'hui la pertinence de ce genre de cadre. En effet, lorsqu'un service est offert à des milliers de personne et qu'un de vos points de vente est la rapidité de prise en charge, les balises doivent être claire et précise afin de pouvoir permettre le meilleur triage possible. Malheureusement, cela implique de gérer la frustration de personne s'attendant à un service, qui finalement n'en reçoive pas.
Pour ma part, faire une intervention à court terme, (4-6 rencontres), d'une durée limité (25-45 minutes), pour des problématiques excluant toute difficulté considéré comme trop lourde (idées suicidaires, problème de consommation, problème de santé mentale récurrent, etc.), ne correspondait tout simplement pas à ma vision de ce qu'est l'intervention. Personnellement, j'ai besoin du temps, de l'espace, et de toute la latitude nécessaire pour offrir une intervention personnalisée aux besoins spécifiques de la personne que j'accompagne.
Malgré tout, cette expérience de travail m'a permis de développer tout un pan de ma pratique qui n'existait pas auparavant : la visioconférence. À l'origine, j'étais mitigé face à l'idée de faire du 100% en ligne. Je sortais de 8 ans de travail de proximité, dans la rue, sur le terrain avec les gens. Me retrouver à temps plein derrière un écran n'était pas exactement mon milieu d'intervention naturel. Voir une personne en chaire et en os permet de capter des détails qui peuvent vous échapper lorsqu'à distance : inflexion de la voix, tension dans le corps, posture, inconfort. J'ai dû apprendre à dépister à travers l'écran tous ces signes qui en disent tant.
Aujourd'hui? Bien que je préfère encore voir les personnes en ''vrai'', je ne me passerais plus de la visioconférence dans ma pratique. Elle offre une flexibilité autant dans les horaires surchargés des gens qui ne consulteraient pas autrement, qu'une flexibilité au niveau de la distance. Bien que basé en Mauricie, j'ai la chance immense d'accompagner des gens de partout au Québec. Dans un contexte de pénurie de ressources pour répondre aux besoins en santé mentale, cette flexibilité est nécessaire.
Elle offre aussi un plus grand choix aux personnes. Si vous vivez dans une région où le nombre de professionnel est limité, que vous ne trouvez aucune disponibilité outre un intervenant avec qui le lien ne passe pas, avant la pandémie, soit vous arrêtiez votre suivi et restiez seul avec vos problèmes, soit vous vous mainteniez dans un suivi qui ne répondait pas réellement à vos besoins. En 2025? Le moindrement que vous êtes à l'aise avec le mode de communication, la possibilité d'essayer et de choisir quelqu'un avec qui le courant passe existe.
Évidemment, des balises doivent être établies. Toute les problématiques ne se travaille pas en visioconférence. Il y a des bonnes pratiques à respecter, et parfois il est nécessaire, pour être efficace, d'être en personne, d'aller dans le milieu de vie et d'observer concrètement ce qui s'y passe. C'est pour cela, à mon sens, que des situations comme celle soulevée dans l'article de La Presse doivent être dénoncée systématiquement. Comme le phénomène est nouveau, le risque de dérive est présent. Que ce soit pour une plateforme de télémédecine ou pour un professionnel en pratique privée qui dérive.
L'appâts du gain ne doit pas prévaloir, surtout pas lorsque l'on joue avec la santé mentale et physique d'une personne.
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