À nouveau, ma mauvaise habitude de me réveiller avec les nouvelles stimule mon besoin de partager mon indignation face à une situation totalement inacceptable. Pour vous mettre en contexte :
Scandale sexuel au centre de réadaptation cité des prairies : https://www.lapresse.ca/actualites/justice-et-faits-divers/2024-10-24/montreal/scandale-sexuel-au-centre-de-readaptation-cite-des-prairies.php
Au cours des deux dernières années, au moins neuf éducatrices en poste au centre de réadaptation Cité-des-Prairies, où sont notamment hébergés des jeunes ayant commis des crimes, ont eu des échanges sexuels avec au moins cinq résidants mineurs. À la suite d’une enquête interne, deux gestionnaires ont été suspendus, a appris La Presse.
Malheureusement pas la première histoire du genre. Encore une couche de préjugé vient de se rajouter dans le grand public sur la profession d’éducateur. Alors vous vous demandez peut-être pourquoi je lie ce genre d’histoire à la question d’un ordre professionnel? Tout simplement parce que techniquement, les 9 personnes concernées dans cette histoire pourraient, sans aucun problème, être de nouveau employée à titre d’éducatrice, malgré une inconduite grave dans un contexte professionnel. Je m’explique.
À l’heure actuelle, l’Association des Éducatrices et Éducateurs Spécialisés du Québec a bel et bien un mécanisme de plainte qui a pour but de protéger le public. L’AEESQ peut réceptionner les plaintes, analyser le dossier, émettre des recommandations et bannir quelqu’un de l’association. Toutefois, sa portée est limitée. En effet, son pouvoir s’arrête là : empêcher quelqu’un d’avoir un membership de l’association, et avoir une plainte à son dossier advenant qu’une personne décide de l’interpeller pour connaître ses antécédents.
De plus, l’association est jointe sur base volontaire, et ne peut qu’évaluer des plaintes uniquement envers ses membres. C’est donc dire que si les 9 personnes accusées dans l’article ne sont pas membres, l’AEESQ est impuissante. C’est donc dire que ces 9 personnes, advenant qu’elle trouve la manière de changer de région et de convaincre un nouvel employeur de les embaucher, elle pourrait sans aucun problème œuvrer de nouveau à titre d’éducatrice. Vous vous dite, mais non ce n’est pas possible ! Tous les employeurs vont faire les vérifications qui se doivent ! Non.
Une simple discussion avec des éducatrices du milieu scolaire pourrait vous convaincre autrement. Il y a des éducateurs qui passent d’une école à l’autre lorsqu’ils se font renvoyer d’un milieu, voire même d’une commission scolaire à l’autre lorsque les directions réussissent à monter un dossier suffisamment complet pour justifier le renvoi. Ces mêmes personnes peuvent continuer à travailler à titre d’éducateurs. Même chose avec les éducateurs pris en défaut à la DPJ dans le scandale qui a été exposé il y a quelques semaines en Mauricie. Des risques liés à notre profession, il y en a.
Mais le gouvernement fait toujours la sourde oreille. Certains ordres professionnels freinent les démarches des éducateurs afin de rejoindre l’office des professions. La candidature des éducateurs est mise sur la glace, car il n’y a pas d’urgence, parce qu’il y a une réforme, parce qu’avec les professeurs c’est pire, parce que, parce que, parce que. La profession d’éducateur n’est pas valorisée, elle n’est pas reconnue pour sa spécificité, et les risques associés sont minimisés.
Lorsque les éducateurs cesseront d’être traités comme du personnel de soutien. Lorsque les éducateurs cesseront d’être vu de haut pas les autres corps de métiers œuvrant en intervention. Lorsque le gouvernement verra les éducateurs comme autre chose que des aides à la classe. Lorsque la population nous verra comme une partie intégrante des solutions en santé dans le domaine de la santé mentale, peut-être la profession deviendra plus intéressante, plus sécuritaire.
L’ordre n’est pas garante de tout, mais elle pourrait au minimum nous permettre de faire du ménage parmis las personnes qui occupent ce rôle et s’assurer que les personnes non qualifiée, ou celles qui comettent des fautes graves, ne puissent plus jamais intervenir à titre d’éducateur auprès de qui que ce soit.
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